DIT FORMATION REMET LE TERRAIN AU CŒUR DE LA FORMATION Interview

Publié le par Mathias LOVAGLIO

Après plus de 16 ans d’expérience en tant que diagnostiqueur immobilier, Vincent Delaroche a choisi de transmettre son savoir-faire en créant DIT Formation. Son objectif : combler le fossé entre la théorie et la pratique, en proposant une immersion concrète sur le terrain. Dans cet entretien, il revient sur les raisons de ce virage, le contenu de ses formations, et les lacunes qu’il observe chez les nouveaux certifiés.

Vincent, pourquoi avoir créé DIT Formation ?

Dans mon ancien cabinet de diagnostic, j’ai souvent recruté des techniciens débutants. Au fil des années, je me suis rendu compte qu’ils nécessitaient un accompagnement de plus en plus long. En fonction des profils, il fallait compter entre trois et huit semaines avant qu’ils ne deviennent opérationnels et autonomes. Ce n’était pas dû à un manque de connaissances théoriques, mais plutôt à de vraies difficultés à s’adapter au terrain. Beaucoup de ces nouveaux techniciens se plaignent du peu de temps consacré à la pratique pendant leur formation initiale, contrairement à ce que j’ai connu il y a 17 ans. Or, connaître la réglementation est indispensable, mais cela ne suffit pas : l’apprentissage du terrain est tout aussi essentiel.

En parallèle de mon activité, l’OFIB, l’organisme qui m’avait formé à mes débuts, m’a proposé d’intervenir ponctuellement sur leurs sessions à Angers, notamment pour assurer la partie pratique sur un gîte mis à disposition pour l’occasion. J’ai tout de suite accroché. Cette expérience m’a donné envie d’aller plus loin. Lorsque j’ai évoqué avec ces stagiaires mon projet de créer un centre de formation uniquement basé sur la pratique des diagnostics, tous ont fait part de leur grand intérêt. C’est là que j’ai compris qu’il y avait un vrai besoin à combler.

J’ai donc mûri le projet pendant deux ans, jusqu’à céder mon cabinet en mars 2024, et les sessions de DIT Formation ont véritablement démarré en octobre dernier.

En quoi consistent concrètement les formations proposées par DIT Formation ?

À l’origine, mon objectif était d’accompagner des personnes tout juste sorties de formation et de certification, qui envisagent soit de créer leur propre structure, soit de postuler dans une entreprise. Mon idée est de les accueillir pendant une semaine pour leur montrer comment se déroulent réellement les diagnostics sur le terrain, en mettant en application les notions vues lors de leur formation initiale. Je les aide à lever les zones d’ombre, à donner du sens à certains termes ou formulations rencontrés dans les normes. L’objectif est de les rassurer, de les rendre plus autonomes et de les faire monter en compétences avant qu’ils ne se lancent. Très vite, je me suis rendu compte que mes formations intéressaient aussi des diagnostiqueurs exerçant depuis plusieurs mois, qui cherchent à approfondir leurs pratiques. Certains viennent pour une journée spécifique consacrée à un domaine en particulier.

Je limite chaque session à cinq stagiaires, ce qui me permet de proposer un accompagnement individualisé, en tenant compte des différences de niveau.

Je suis installé dans la Sarthe, aux portes du Mans. Je dispose d’un grand bureau aménagé en salle de formation ce qui me permet de débuter les sessions par des rappels théoriques, notamment sur les notions de surface, souvent survolées en formation initiale.

À côté, j’ai acheté une maison témoin des années 1970, parfaitement adaptée à la réalisation de tous les diagnostics. Cela permet aux stagiaires de s’entraîner dans des conditions proches du réel. Je leur apprends à conduire plusieurs diagnostics dans une même intervention, ce qui est rarement abordé lors des formations initiales. Je consacre également du temps à la prise en main du logiciel, notamment Liciel.

Je propose aussi des sessions de formation axées sur le pilotage d’activité, destinées aux solo-preneurs, pour les aider à affiner leur approche commerciale ou encore à construire une grille tarifaire cohérente — des aspects essentiels qui sont souvent négligés dans les parcours de formation traditionnels.

Quel est le coût de vos formations, et sont-elles finançables ?

Je propose une tarification à 250 € HT par jour, soit 1 250 € pour une semaine complète. Le fait d’être certifié Qualiopi permet à mes stagiaires de mobiliser certaines aides, notamment l’Aide individuelle à la formation (AIF) délivrée par France Travail, en complément des dispositifs de France Compétences pour le financement de la formation initiale. Il suffit de démontrer que la formation va leur permettre de monter en compétences et favoriser leur retour à l’emploi.

Quelles sont les principales lacunes que vous observez chez les stagiaires qui participent à vos formations terrain ?

Ce qui frappe d’abord, c’est l’hétérogénéité des niveaux. Certains stagiaires sont très compétents, mais d’autres présentent des lacunes importantes, tant sur le plan théorique que pratique. Et parfois, on peut franchement s’interroger sur la manière dont ils ont pu obtenir leurs certifications.

Difficile de dire si cela vient de la qualité de la formation dispensée par l’organisme ou du niveau d’implication du stagiaire. En revanche, ce qui m’inquiète le plus, c’est que l’organisme certificateur ait validé leur compétence malgré tout. Certains semblent avoir trouvé une méthode efficace pour passer entre les mailles du filet, sans pour autant avoir le niveau nécessaire pour exercer. Le bachotage est très répandu, et on se retrouve avec des certifiés qui, dans les faits, ne maîtrisent même pas certaines notions élémentaires — comme la surface de référence d’un DPE. Quand j’ai passé mes premières certifications, nous étions confrontés à des situations concrètes : une chaudière pour le gaz, un tableau pour l’électricité… Il était plus facile, dans ces conditions, de repérer ceux qui n’avaient pas les connaissances requises.

Mais mes stagiaires ont bien conscience de leurs lacunes et mon objectif est alors de leur apporter la confiance nécessaire à l’exercice serein de leur nouveau métier. Je cherche à désacraliser la pratique du diagnostic pour la rendre plus accessible et compréhensible.

Aujourd’hui, les lacunes touchent tous les domaines, mais les deux diagnostics qui posent le plus de problèmes sont toutefois l’électricité — en particulier l’analyse du tableau — et le DPE. Il n’est pas rare de rencontrer des stagiaires qui n’ont jamais réellement pratiqué un DPE au cours de leur formation. Ils éprouvent donc des difficultés dans sa réalisation, mais aussi sur certains points techniques comme les ponts thermiques ou le calcul du b.

Sur le plan logiciel, au-delà de la simple prise en main, j’insiste beaucoup sur la nécessité de ne pas accorder une confiance aveugle à l’outil. En tant que tuteur DPE pour un OF, j’ai vu trop de diagnostiqueurs s’en remettre entièrement à leur logiciel pour des calculs complexes, comme ceux des ponts thermiques, alors même que l’outil n’est plus capable de produire un résultat fiable dans certaines configurations.

Enfin, j’attire aussi l’attention des stagiaires sur l’importance des commentaires dans les rapports. Ce n’est pas suffisant de mentionner qu’un espace n’a pas pu être visité : il faut expliquer pourquoi. Ces précisions sont encore trop rarement utilisées, alors qu’elles pourraient éviter bien des litiges.

Pensez-vous que les formations terrain comme les vôtres devraient être mieux intégrées au parcours global de formation des diagnostiqueurs ?

Oui, clairement. Le tutorat mis en place pour le DPE est une bonne chose, mais il devrait, à mon sens, être étendu à l’ensemble des domaines. Bien sûr, cela poserait la question du financement, mais quand on voit les lacunes qui subsistent pour certains à la sortie des certifications, un accompagnement terrain par domaine serait vraiment pertinent.

Aujourd’hui, ce sont principalement des diagnostiqueurs nouvellement certifiés qui me contactent à titre individuel. Je ne suis pas encore sollicité par des chefs d’entreprise qui souhaiteraient m’envoyer un salarié en formation, et c’est dommage, car ma formule conviendrait parfaitement à un diagnostiqueur solo qui recrute son premier technicien. L’accompagnement terrain est très difficile à assurer en interne dans ce type de situation.

Nous sommes dans une période où beaucoup s’interrogent sur la manière de faire évoluer et d’améliorer les formations. Il me semblerait logique de renforcer les synergies avec les organismes de formation initiale, afin qu’ils puissent orienter leurs stagiaires vers ce type de complément. On pourrait même envisager d’intégrer cette semaine terrain avant le passage des certifications, pour permettre une mise en pratique directe des connaissances acquises.

Vincent Delaroche en bref

Vincent Delaroche a exercé le métier de diagnostiqueur immobilier pendant plus de 16 ans. Après une formation à l’OFIB et à la création d’entreprise, il lance sa société en 2008, en pleine crise immobilière. Grâce à une approche pédagogique et une forte implication auprès des prescripteurs, il développe son activité jusqu’à encadrer six salariés. Fort de son expérience, il choisit en 2024 de se consacrer entièrement à la formation. Avec DIT Formation, il vise à combler le décalage entre l’apprentissage théorique et la pratique terrain, en transmettant son expérience à la nouvelle génération de diagnostiqueurs.

Plus d’informations sur le site internet de DIT Formation

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