MATERNITÉ, ARRÊT MALADIE : UNE ÉPÉE DE DAMOCLÈS SUR LES CERTIFICATIONS Profession

Congé certification
Publié le par Mathias LOVAGLIO

En l’absence de dispositions spécifiques dans la réglementation, les diagnostiqueurs en arrêt longue durée, pour raison de santé ou maternité, risquent de perdre leur certification. Les organismes de certification tentent de s’adapter, et un projet de “congé certification” a été soumis aux pouvoirs publics pour combler ce vide juridique.

Contexte et enjeux d’une situation floue dans les textes

Le métier de diagnostiqueur immobilier repose sur un système de certification strict. Pour conserver leur droit d’exercer, les professionnels doivent respecter un cycle composé de plusieurs obligations : surveillance documentaire, contrôle sur ouvrage (CSO) et formation continue. Or, les arrêtés « compétences » — celui du 20 juillet 2023 pour le DPE et celui du 1er juillet 2024 pour les autres domaines — ne prévoient rien pour les certifiés contraints de suspendre temporairement leur activité pour cause de congé maternité, parental ou arrêt maladie de longue durée.

Cette absence de dispositions crée une insécurité pour les diagnostiqueurs concernés : non-respect des opérations de certification, suspension ou retrait de certificat, voire impossibilité de réintégrer la profession sans repasser par une formation initiale.

Comment les OC s’adaptent en l’absence de cadre réglementaire ?

La réglementation actuelle ne permet pas d’interrompre ni de proroger la durée d’un certificat. Face à cette lacune, les organismes de certification (OC) s’efforcent de trouver des solutions adaptées à ces situations qui relèvent de la force majeure, mais pour lesquelles rien n’est cadré. Caroline Hayter, responsable des opérations chez Abcidia Certification, explique qu’elle suit les instructions de sa consultante qualité Cofrac et les adapte au cas par cas afin de trouver la meilleure solution pour la personne certifiée, malgré l’absence de cadre réglementaire. Le problème se pose surtout pour les CSO et le cycle de certification DPE qui laissent moins de marge de manœuvre en raison de délais resserrés pour réaliser les opérations obligatoires. En cas d’arrêt de moins d’un an, les certifications sont temporairement suspendues. Dès que la personne reprend son activité, le certificat est réactivé, et un délai réduit est accordé pour réaliser le CSO ou les autres obligations du cycle. « Cela permet de réaliser le contrôle de l’année en cours plus ou moins dans les délais », précise Caroline Hayter.

Mais dès lors que l’interruption dépasse un an, les marges de manœuvre se réduisent, surtout pour le DPE. « Pour le DPE, nous n’avons d’autre choix que procéder à un retrait de certificat, mais nous proposons un geste commercial sur la recertification. Malheureusement, cette personne sera dans l’obligation de refaire une formation initiale, ce n’est donc pas une bonne solution ».

Un projet de “congé certification” porté par l’ONEDI

Pour sortir de cette gestion au cas par cas et instaurer un cadre équitable et clair, Patrick Gombaud, président de l’ONEDI (Organisation nationale d’éthique du diagnostic immobilier), a récemment transmis un projet de texte auprès des pouvoirs publics. Il propose la création d’un congé certification. « Il ne s’agit ni d’une suspension, ni d’une radiation. L’idée est de prendre la timeline, de l’interrompre, puis de la décaler d’autant que dure l’indisponibilité », explique-t-il.  Le projet de l’Onedi prévoit un report automatique de toutes les obligations du cycle (CSO, surveillance, formation) pour les arrêts compris entre trois mois et un an – voire 18 mois. Au-delà de six mois, une phase de reprise de l’activité serait imposée, avec des obligations de formation de remise à niveau ou des journées terrain selon les cas.

« Cette solution serait logique et elle nous permettrait de mettre en veille le cycle et de le reprendre là où il a été interrompu. L’intégration d’une remise à niveau permettrait aussi d’attester du maintien des compétences », indique Caroline Hayter.

Patrick Gombaud alerte aussi sur les conséquences sociales de la situation actuelle. Il cite le cas d’un diagnostiqueur certifié amiante, salarié, ayant perdu sa certification après une grave blessure suivie de complications post-opératoires. « Comme il est salarié, le fait de perdre sa certification justifie un licenciement pour motif réel et sérieux. Nous sommes en infraction avec le code du travail. »

Anticiper : le mot d’ordre pour les diagnostiqueurs concernés

En attendant une éventuelle évolution réglementaire, la vigilance et l’anticipation restent de mise. Il est fortement recommandé aux diagnostiqueurs confrontés à une situation de congé ou d’arrêt long de contacter sans attendre leur organisme de certification. Une démarche proactive peut permettre de préserver son droit d’exercer tout en respectant les exigences de la certification, dans un contexte où les textes ne prévoient pas encore de garde-fous.

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