CERTIFICATION : « ON EST FACE À UN SYSTÈME COUPERET » Technique

Publié le par Alain

S’ils restent majoritairement attachés aux certifications comme l’a montré notre sondage, les diagnostiqueurs n’en demeurent pas moins critiques sur le régime actuel. C’est ce qui ressort de notre sondage. Mais, entre les tenants d’un renforcement des compétences et exigences et ceux qui aspirent à plus de latitude une fois leurs certifications obtenues, conclure sur une véritable vision partagée par l’ensemble de la profession s’avère difficile, voire impossible.

 

Une préparation au terrain insuffisante

Les lacunes dans la préparation aux réalités du métier lors de la formation initiale est l’une des thématiques qui ressort le plus de notre sondage. « Beaucoup trop d’organismes sont des préparateurs à la certification et pas au métier » constate l’un, tandis que d’autres demandent des « formations terrains obligatoires », « un stage de formation en entreprise », du « travail en binôme » ou plus de « pratique sur une maison test avec les formateurs ». Bref : « une vraie formation métier et non pas une information juridique » actuellement sanctionnée par « un examen théorique » sans « étude de cas concrets » et dont les résultats manquent de visibilité : « bonnes et mauvaises réponses doivent être connues du candidat, afin de ne pas reproduire ses erreurs ».

 

« Comment être un bon diagnostiqueur en ne faisant que des Powerpoint et quelques visios ? »

 

Les formations devraient aussi accorder plus d’importance aux « connaissances globales du bâtiment, aux modes constructifs et techniques. Trop de jeunes certifiés n’ont pas la compétence et les connaissances. »Bien placés pour juger des aptitudes de ces nouveaux certifiés, plusieurs directeurs de cabinets de diagnostic immobilier confirment que « les ODI sortent de formation sans aucune expérience du terrain ».

« Doubler la durée de la formation initiale » et proposer « un meilleur accompagnement après l’obtention de la certification » sont des pistes évoquées. Mais, en l’état actuel, de nombreux sondés voudraient surtout la mise en place « d’une période probatoire de deux ans avant de pouvoir ouvrir son cabinet de diagnostic » qui permettrait de « réduire le nombre de sinistres » et de remédier à ces formations/certifications qui ne préparent pas assez au métier.

Plus critique, un sondé compare les formations à des « cash machines » et considère qu’il serait « plus simple de nous former tout seul avec des personnes compétentes. Ni les organismes de formation et ni ceux de surveillance ne répondent à nos questions ».

 

Un accompagnement renforcé après la certification

Les sondés sont nombreux à réclamer un renforcement de la formation continue aussi bien en fréquence qu’en contenu. Certains insistent aussi sur l’importance qu’elles se tiennent en présentiel afin de favoriser les échanges entre diagnostiqueurs : « c’est le seul moment où le diagnostiqueur solo sort de son isolement ».

Le manque de terrain durant la formation/certification initiale pourrait être compensé par les opérations de surveillance et de contrôles en cours de cycle. D’ailleurs, certains émettent l’idée « d’augmenter la fréquence des CSO » ou de « raccourcir les délais pour la surveillance et les CSO des nouveaux certifiés. » Mais beaucoup sont déçus par la qualité des contrôles qui ne répondent pas à leurs besoins de d’actualisation ou de montée en compétences : « le minimum serait d’avoir un échange constructif avec l’OC, de travailler, d’échanger afin de mettre en place le plan de progrès et d’amélioration des opérateurs. Dans le cas présent, le système est un système de couperet ». Plus radicaux, quelques sondés en appellent même à la suppression des contrôles sur site ou de la surveillance documentaire pour laquelle « il est tellement facile de faire un dossier arrangé ».

Pourtant, beaucoup de sondés réclament des contrôles plus stricts pour sanctionner les mauvaises pratiques, par exemple « quand un diagnostiqueur dépasse un certain nombre de dossiers dans l’année » ou pour vérifier que « tous les employés d’une société sont certifiés et bien assurés ». Ces contrôles pourraient même être inopinés et fonctionner différemment pour s’assurer qu’ils portent « sur des dossiers réellement envoyés aux clients et non sur des dossiers qu’il est potentiellement possible de corriger avant le contrôle documentaire ». Mais, les OC sont parfois accusés de manquer d’impartialité sur ce point.

Toujours d’actualité également, la question du coût du dispositif, certains n’hésitant pas à parler de « racket » ou de « vol ». Pour le réduire, certains proposent la mise en place d’un tarif unique pour les CSO et la surveillance, voire une gratuité de la recertification. Sans parler du stress induit par les contrôles, surveillances et recertifications d’autant plus que « certains organismes en profitent pour jouer sur les délais et mettre la pression sur les diagnostiqueurs. Un rapport des audits COFRAC pour certains organismes serait le bienvenu, les erreurs se multiplient pouvant conduire à des suspensions (contrôle des rapports en retard, pas d’envoi des résultats en recommandé, mail dans indésirable) ».

 

« Les procès s’occupent des mauvais diagnostiqueurs »

 

Assouplir ou supprimer la recertification ?

La rigidité du système comporte aussi quelques aberrations, comme dans le cas des diagnostiqueurs en fin de carrière qui doivent repasser toutes leurs certifications, certains préférant alors céder ou arrêter leur activité par anticipation. Un allègement serait le bienvenu.

Certains proposent d’allonger encore un peu plus la validité des certifications, 10 ans revenant à plusieurs reprises.

Mais c’est bien à la suppression des certifications que 74% des sondés se disent favorables. L’argument est connu : « Est-ce normal d’avoir un couperet au-dessus de la tête tous les 5 ou 7 ans ? Aucune profession n’est remise en cause comme la nôtre par des examens réguliers. »

Cette recertification pourrait être remplacée par « une remise à niveau » et/ou « des contrôles sur site ». « Cela va faire 4 fois que je passe les certifications. Peut-être qu’au bout d’un certain temps, il serait bien de ne plus passer les certifs et de faire plus de formation », résume un sondé. « Les procès s’occupent des mauvais diagnostiqueurs », conclut un autre.

Enfin, d’autres idées sont évoquées par quelques sondés : la certification d’entreprise ou la création d’un ordre « totalement indépendant et seul représentant légal de la profession ».

 

Des prérequis renforcés, voire une formation diplômante

Plusieurs sondés évoquent le sujet des prérequis et des équivalences en amont de la certification, notamment pour demander la suppression du titre 3 « qui est une catastrophe en termes de sinistralité » ou « de l’équivalence du Bac+2 par VAE car manifestement l’octroi de ce niveau est donné trop facilement et à des personnes non techniques ». Un « remplacement par un vrai diplôme ou un BTS génie civil » est également suggéré. De manière générale, l’appel à un renforcement des prérequis revient à plusieurs reprises, notamment en matière de compétences en techniques du bâtiment.

Face aux doutes sur l’impartialité des organismes de formation et de certification, quelques sondés émettent l’idée que la formation soit assurée par un organisme rattaché au ministère de l’éducation nationale, avec la création d’un véritable diplôme d’État ou d’un concours qui ne dispenserait pas nécessairement les opérateurs d’une surveillance de leur activité.

 

Mathias Lovaglio

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