LA RÉFORME DE LA CERTIFICATION DPE ET AUDIT VUE PAR LES OC ET LES OF Devenir diagnostiqueur immobilier

DPE - Formation et certification
Publié le par Mathias LOVAGLIO

Le 1er juillet 2024, un régime de certification plus exigeant entrera en vigueur pour le DPE et l’extension Audit énergétique. Le point sur les principales évolutions à retenir avec Juliette Jannot, directrice générale d’I.Cert, Séverine Micheau, responsable de la certification de personnes chez Afnor Certification, Nicolas Czarnecki, co-gérant de SONELO Formations, et Étienne Ternisien, responsable bâtiment et énergie chez Up n’PRO.

Les dates clés de la mise en place des régimes de certification DPE et audit énergétique

Des prérequis plus exigeants

L’accès à l’extension de certification pour l’audit énergétique sera réservé aux détenteurs d’une certification DPE valide pendant au moins 2 ans au cours des 3 dernières années. Néanmoins, afin de ne pas exclure les auditeurs habilités selon le régime transitoire en vigueur jusqu’au 30 avril 2025, un diagnostiqueur disposant d’une attestation prorogée, selon l’ancien référentiel, pourra candidater même s’il détient sa certification DPE depuis moins de 2 ans. Cette introduction d’une d’expérience ne constitue pas le seul renforcement des prérequis puisque le DPE est aussi concerné comme l’explique Juliette Jannot : « la disparition de la mention « toute preuve de la détention de connaissances équivalentes en lien avec les techniques du bâtiment » clarifie et restreint l’entrée pour le DPE ».

Une formation initiale considérablement renforcée

Le nouveau dispositif de certification augmente tout d’abord de façon importante la durée minimale de la formation initiale (56h pour le DPE sans mention et 10 jours pour l’audit énergétique). « En termes de contenu théorique, il n’y a pas de révolution. C’est surtout sur la partie pratique que la donne va changer pour les nouveaux entrants avec 28h pour le DPE et 35h pour l’audit énergétique » précise Nicolas Czarnecki. « C’est une très bonne chose car ils auront plus de pratique avant de partir en mission et ils auront déjà manipulé un logiciel ». « On peut néanmoins regretter que la durée de la formation théorique pour l’audit énergétique soit aussi longue dans la mesure où le référentiel réglementaire pour l’audit est sur certains points très proche du référentiel DPE », nuance Étienne Ternisien, « sans parler de ceux qui pratiquent déjà l’audit énergétique et qui vont devoir refaire une formation initiale ».

« Consolider le dispositif pour les diagnostiqueurs et légitimer leur maintien dans le dispositif d’audit énergétique au cœur des aides financières 2024 et des années à venir était important », E. TERNISIEN (Responsable Bâtiment et Énergie chez Up n’PRO)

Une partie de la formation pratique devra impérativement être dispensée en présentiel, avec également des heures de « terrain » dans des bâtiments ou parties de bâtiments réels ou aménagés, ce qui pourrait poser des difficultés d’organisation. Bien réel ou plateforme pédagogique, certains organismes de formation réfléchissent encore à la solution idéale. Chez Up n’PRO, qui vise une couverture nationale, la réponse passera par des plateformes pédagogiques qui permettront de garantir une homogénéité des contenus et « d’avoir un peu d’intelligence en allant plus loin dans le geste métier en reproduisant des situations concrètes ». Chez Sonelo, on hésite encore entre l’adaptation de la plateforme pédagogique existante (maison miniaturisée) et la location de biens réels pour quelques journées.

Examens de certification : une évolution en deux temps

Les examens de certification reposeront toujours sur une partie théorique et une partie pratique. « Au 1er juillet 2024, le volet théorique est modifié avec un examen en présentiel dont la durée est imposée (90 mn pour le sans mention et 45 mn pour la mention) », explique Juliette Jannot. Si sa forme ne change pas (QCM), les pratiques des organismes de certification vont cependant être harmonisées avec la mise à disposition d’une base nationale de questions par le ministère et surtout un seuil de réussite désormais fixé réglementairement (75%).

« Il y avait un besoin d’harmonisation des pratiques au sein des OC pour avoir des évaluations plus équitables », S. MICHEAU (Responsable de la certification de personnes chez Afnor Certification)

L’examen pratique évoluera, quant à lui, en deux temps. Dès le 1er juillet prochain, les organismes de certification devront tenir compte des évolutions de compétences qui ont été notifiées mais toujours sur la base d’une mise en situation. Puis, au plus tard le 1er mai 2025 pour l’audit énergétique et le 1er janvier 2026 pour le DPE, l’examen pratique devra être réalisé sur un bâtiment réel ou aménagé. Pour les certificateurs, son organisation s’annonce complexe. « Cela pose la question de l’équité de traitement entre les candidats en fonction du type de bien sur lequel ils passeront leur épreuve pratique », prévient Séverine Micheau. Les organismes de certification disposent encore d’un an pour trouver la formule idéale tant sur le plan de l’évaluation des compétences que des coûts d’organisation.

Introduction d’un tutorat et des formations continues plus régulières

Autre grande nouveauté du futur régime de certification DPE : l’introduction d’un tutorat portant sur deux missions réelles et complètes à réaliser durant les 12 premiers mois du cycle. Son organisation incombera aux organismes de formation. « Dans un premier temps, nous allons nous reposer sur notre réseau de formateurs et d’anciens stagiaires pour avoir une réponse nationale dès le 1er juillet 2024 », indique Étienne Ternisien. « Nous disposons pour cela de grilles qui nous permettent de monter une fiche de suivi du tutorat ».

4 journées de formations continues sont prévues sur l’ensemble du cycle pour le DPE (plus 2 jours pour la mention) et 5 pour l’audit énergétique. L’organisme de formation devra planifier un cas test lors de chacune de ces journées pour le DPE et à minima tous les 2 ans pour l’audit énergétique. Il s’agit d’un cas pratique permettant la réalisation d’un diagnostic à partir de données techniques (plans, illustrations, etc.) qui devra être effectué sur le logiciel utilisé par le certifié ce qui pourrait poser des problèmes d’organisation pour les OF. « Avec le cas test, la pédagogie va s’améliorer car cela sera l’occasion de revenir sur les erreurs qui peuvent être faites par le certifié », estime cependant Nicolas Czarnecki.

Les OC espèrent que ces formations continues porteront bien sur les difficultés rencontrées par les certifiés afin d’atteindre l’objectif de montée en compétences. Up n’PRO travaille ainsi à une solution pour optimiser et personnaliser les contenus. « Nous misons sur l’individualisation des parcours » explique Étienne Ternisien. « Nous testons une solution d’évaluation des connaissances utilisant l’IA pour identifier, à partir de mises en situation, les points qui méritent une formation continue avec, par exemple, des modules thématiques en e-learning ».

Quelques nouveautés pour les opérations de surveillance

Désormais, les contrôles sur ouvrage se déclineront selon deux formats. Durant la 1ère année de chaque cycle de certification DPE ou les 6 premiers mois de l’obtention de l’extension Audit, les diagnostiqueurs devront se soumettre à un contrôle sur ouvrage en cours de diagnostic. « Comme il n’y a plus d’examen de renouvellement, il y aura un contrôle en situation réelle au début de chaque cycle. Pour le cycle initial DPE, il pourra être déclenché dès la réalisation de 20 DPE avec une alerte via le site de l’Ademe. Cela ne change pas du CSO, sauf que les grilles de contrôle sont désormais disponibles dans l’arrêté », explique Juliette Jannot. « Il y a tout de même une nouveauté », précise Séverine Micheau : « Dans les 7 jours, le diagnostiqueur devra faire son rapport et nous l’adresser pour vérifier la cohérence entre les observations sur le terrain et le rendu dans le rapport ».

En revanche, les contrôles sur ouvrage après élaboration du diagnostic sont plus novateurs. Ils interviendront lors de la 3e et de la 5e année du cycle. Le choix de la mission contrôlée est laissé à l’appréciation de l’organisme de certification parmi la liste de tous les rapports établis par le diagnostiqueur dans le mois précédant le contrôle. L’OC aura alors la charge de contacter le propriétaire pour organiser le contrôle, ce qui implique que le diagnostiqueur recueille en amont le consentement de ce dernier. « On ne sait pas comment les gens vont réagir », s’inquiète Juliette Jannot qui craint également des difficultés en termes de planification. Séverine Micheau poursuit : « Il va falloir que nous sélectionnions un bien, que nous contactions le propriétaire, qu’il accepte. En termes d’organisation, cela risque d’être un peu compliqué. On ne sait pas comment nous allons être accueillis. Heureusement, nous sommes dans une phase de dialogue sans précédent avec le ministère. Si ce nouveau contrôle ne répond pas aux attentes qui ont été fixées, il ne faudra pas hésiter, en tant qu’OC, à le faire remonter à la DHUP ».

Enfin, les surveillances documentaires, au nombre de 3 par cycle, sont inchangées, sauf qu’elles seront là aussi harmonisées avec une nouvelle grille et des actions mieux cadrées lorsque des écarts sont constatés. Elles pourront conduire à la réalisation d’un cas test.

LES SPÉCIFICITÉS DU CYCLE AUDIT ÉNERGÉTIQUE

Le cycle de l’extension de certification Audit énergétique est similaire à celui du DPE sauf pour :

  • le tutorat qui n’existe pas pour l’audit énergétique ;
  • le CSO en cours de diagnostic à réaliser au cours des 6 mois suivant l’obtention de l’extension ;
  • une journée de formation continue prévue lors de la 5e année.

Par ailleurs, la validité de l’extension initiale Audit énergétique arrivera à échéance à la même date que celle de la certification DPE.

 

Une recertification assouplie

À compter du 1er juillet 2024, il ne sera plus nécessaire de réussir un examen pour renouveler sa certification DPE. « C’est le seul assouplissement du nouveau régime », concède Juliette Jannot. Le renouvellement de la certification, et celle de l’extension audit, se fera à la demande du certifié et sera accordé dès lors que l’OC aura vérifié qu’il a bien validé toutes ses formations continues et ses opérations de surveillance.

L’épineuse question des tarifs…

L’allongement des durées de formation, des durées d’examen et du nombre d’opérations de surveillance va inévitablement engendrer une augmentation des coûts de la certification. Rien que pour la formation initiale DPE, Nicolas Czarnecki estime que le prix devrait doubler.

« Il faut trouver des solutions qui répondent aux besoins de la certification pour valider des compétences tout en tenant dans un schéma économique raisonnable pour le diagnostiqueur », J. JANNOT (Directrice générale d’I.Cert)

Par ailleurs, OF et OC n’ont pas encore arrêté leurs tarifs pour certains nouveaux dispositifs comme le futur examen pratique, les contrôles sur ouvrage après élaboration du diagnostic ou les cas tests. « Je ne connais pas encore les impacts pour nous en termes d’exploitation et de personnel », indique Juliette Jannot, « mais cela représente déjà un coût important ».

Au regard de toutes les interrogations qui persistent sur la mise en œuvre du futur dispositif de certification DPE/Audit énergétique, Séverine Micheau conserve l’espoir que des adaptations seront possibles en cas de difficultés : « Nous sommes maintenant dans une relation d’échanges avec la DHUP, plus largement avec toute la filière, et nous aurons l’occasion de faire part de nos retours d’expérience dès les premiers mois d’application ».

Diagnostiqueurs déjà certifiés : anticipez !

Pour les diagnostiqueurs déjà certifiés DPE et qui vont devoir basculer sur le nouveau régime au 1er juillet 2024, les OC ont prévu de prendre les devants. « Nous allons faire une communication individuelle pour leur expliquer où ils en sont dans le cycle et leur préciser quels seront les contrôles et les formations à réaliser avant la fin de l’année pour ceux qui seront concernés par des échéances », indique Juliette Jannot. « Nous sommes dans l’attente de l’extension de notre accréditation pour pouvoir communiquer et accompagner chacun de nos certifiés. Il ne faudrait surtout pas qu’ils se retrouvent en difficulté à cause d’une échéance dépassée, même si une période transitoire de 6 mois a été instaurée pour régulariser la situation de chacun », insiste Séverine Micheau.

« Sur les formations audit énergétique, nous risquons d’avoir un gros goulot d’étranglement à la fin de l’année », N. CZARNECKI (Co-gérant de Sonelo Formations)

Les OF ont également prévu des actions de communication afin d’inciter à anticiper les échéances. Pour Étienne Ternisien, « il ne faut surtout pas attendre les dates butoirs, notamment la fin de validité de l’attestation prorogée de l’audit énergétique ». D’autant plus qu’une forte demande est attendue fin 2024/début 2025. Les OF vont d’ailleurs proposer des formations séquencées pour l’audit énergétique afin de mieux pouvoir les ventiler pour les diagnostiqueurs et ainsi éviter de les immobiliser sur de trop longues périodes.

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2 commentaires

  • alexandre besançon a écrit

    17 ans que la certification existe, payer pour avoir le droit de travailler est ce qu’il y a moins de sinistre la réponse est non suffit de voir les relevés d assurance
    ce dpe doit étre supprimé toute ces contraintes et cout sont une aubaine pour les centres formations et certif, le logiciel dpe est mauvais, le guide truffé d erreurs, les diagnostiqueurs encore et tjrs les dindons de la farce.Qui pour nous défendre? personne

    • ETIC a écrit

      Entièrement d’accord, aucune prise en compte de la qualité d’exécution des odi certifiés depuis longtemps ni de leur expérience professionnelle autre.
      Pourquoi ne pas ajuster ces formations à rallonge en fonction des lacunes trouvées lors des surveillances ou cso, ce serait plus pragmatique et moins onéreux.
      Et puis si c’est pour maintenir les margoulins, aucun intérêt hormis nous faire payer, comme d’habitude.
      Cette certification est une mascarade, nul n’est parfait mais je me vois régulièrement relever des écarts qui ne sont pas justifiés ou dont la justification est erronée car il faut absolument trouver des écarts sinon ça voudrait dire que l’ OC ne fait pas son boulot …. et ils ne répondent pas aux réclamations pourtant dûment argumentées.
      Qu’est ce que c’est que ce système où on ne peut pas défendre son droit au travail ?!!! Une véritable entorse à l’état de droit .
      Continuons de laisser faire …

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