GUY DEPRESLE (LD2I) : « LA QUALITÉ DES FORMATIONS EST LE GROS PROBLÈME DE NOTRE MÉTIER ! » Interview

Guy Depresle (LD2i)
Publié le par Mathias LOVAGLIO

PDG du réseau LD2i et administrateur de la CDI FNAIM, Guy Depresle revient sur l’activité de son réseau ainsi que sur l’actualité et les problématiques de la filière. Critique à l’égard des orientations prises pour assurer la montée en compétences des diagnostiqueurs, il pointe du doigt la qualité des formations initiales. Une interview sans concession.

Guy Depresle, comment se porte votre réseau de franchises ?

Actuellement, nous nous trouvons plutôt dans une phase de consolidation. Nous sommes en effet confrontés à une vague de départs en retraite, une dizaine depuis deux ans, et ce mouvement devrait se poursuivre dans les prochaines années. Notre objectif du moment est donc de compenser ces départs ce qui explique que notre nombre de franchisés reste stable autour d’une cinquantaine de cabinets. Le profil des nouveaux adhérents, des personnes qui débutent dans le métier, ne cesse d’ailleurs de rajeunir. Notre ambition reste avant tout de conserver l’état d’esprit de LD2i.

La conjoncture du marché immobilier est-elle une source d’inquiétude pour l’activité de votre réseau et plus largement de la filière ?

Avec l’arrivée de l’audit énergétique, nous avons constaté une augmentation assez flagrante du prix moyen du panier. Mais, après le coup de chaud pour résorber les dossiers en cours, la demande a diminué et nous n’en faisons désormais quasiment plus.

Pour le reste, le constat vaut pour toute la profession et il n’a rien de nouveau : s’en sortent ceux qui ont une fibre commerciale. A contrario, c’est plus difficile pour ceux qui ont un profil avant tout de technicien. Dans le contexte actuel, ce constat s’accentue inéluctablement. Cependant, il faut arrêter de pleurer sur notre sort. Nous retrouvons tout simplement un volume de transactions plus normal, après plusieurs années exceptionnelles. La situation actuelle ne fait que reproduire ce que l’on a déjà connu par le passé, avec un écrémage des plus fragiles au sein de la profession. En revanche, ceux qui sont intégrés, reconnus et installés de longue date ne font que conforter leur position. Aujourd’hui, au sein du réseau, nous n’avons pas d’adhérents contraints d’arrêter en raison de difficultés commerciales, loin s’en faut !

Quel regard portez-vous sur le marché de l’emploi au sein de la filière ?

Recruter est devenu un enfer ! Même si les salaires peuvent être intéressants, certains ne veulent pas travailler. De plus, nous avons un métier difficile, et le durcissement des certifications va y contribuer encore plus, si bien que certains salariés ont l’impression d’avoir en permanence une épée de Damoclès au-dessus de leur tête. Susciter des vocations dans ce contexte devient difficile, et encore nous ne sommes qu’aux balbutiements des difficultés.

À ce propos, comment accueillez-vous les futures mesures de renforcement de la formation/certification pour le DPE ?

C’est une honte ! Pour une seule et simple raison : aujourd’hui, on tape sur l’intervenant final qu’est le diagnostiqueur, sans jamais se poser la question de la qualité des formations de base. On tire sur les entreprises et les diagnostiqueurs, mais formez-les correctement ! Ce n’est pas en sanctionnant que l’on monte en compétences, mais en apprenant !

Le renforcement prévu des formations initiales ne vous parait donc pas à la hauteur des objectifs ?

Oui… qui est prévu… Cela fait 18 ans que je suis dans le diagnostic immobilier et, à un moment donné, il faut arrêter de tourner autour du pot. La qualité des formations est aujourd’hui le gros problème de notre métier ! Pour former les gens correctement, il faut du terrain ! J’ai repris le contenu de la formation DPE d’un nouveau collaborateur, c’est la même que celle que j’ai faite il y a 15 ans ! On ne leur apprend rien ! Vous leur donnez une tablette, aucun nouveau certifié ne sait faire un DPE. On est sur de la théorie, qu’il faut certes connaitre, mais il n’y a pas de cas pratiques. En interne, nous sommes obligés de refaire une formation pour apprendre aux nouveaux certifiés à faire un DPE. Il est là le scandale. Nous avons la chance d’être un réseau qui forme ou plutôt reforme les nouveaux avant de les envoyer sur le terrain, mais ce n’est pas normal. Quant à ceux qui s’installent en indépendant…

Il faut absolument adapter les formations initiales pour tous les domaines de notre métier, plutôt que de renforcer les sanctions. Si on réglait ce problème, cela éviterait que la presse consumériste tire à boulets rouge sur la profession. C’est une image, mais quand on veut ériger un château de cartes, on commence par construire des bases solides. Pour notre métier, ces bases sont les formations. Aujourd’hui, je pense que l’on prend le problème totalement à l’envers.

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2 commentaires

  • Hervé LEFEBVRE a écrit

    Je suis entièrement d’accord sur la formation initiale. Il faudrait 80% de formation terrain et 20% de théorie. Depuis quand les contrôles documentaires font faire que nous soyons plus compétent??? Déjà que les transactions diminuent, maintenant on nous SANCTIONNE financièrement.

  • Antoine PIETRINI a écrit

    Je ne suis pas totalement d’accord sur les formations initiales qui sont ce qu’elles sont. Théoriques. Il n’a jamais été prétendu le contraire par personne.

    Et merci de ne pas oublier que le programme théorique a gonflé en 15 ans sans que le temps imparti n’ait jamais augmenté. J’ai été formé en 5 jours en 2006, je forme toujours sur 5 jours en 2023, avec un programme au minimum doublé.

    Là où je me pose des questions tous les jours c’est sur « l’ambiance » globale : comment se fait-il que des gens convenablement formés, quelques jours après leur sortie de formation, (re)commencent à raconter les âneries ambiantes (en vrac : validité en amiante, diag loc., DTA à refaire tous les x ans…) alors que leur formateur a passé 5 jours à leur montrer le vrai texte, la vraie réglementation ?

    Autre exemple, pris ce matin ; comment est-il possible qu’un opérateur indépendant, récemment formé, demande sur un groupe fb qu’on lui réexplique « la règle des 3m en amiante » alors que cette « règle » n’existe pas et n’a jamais existé), et n’existe pas plus en plomb d’ailleurs, contrairement à la légende urbaine encore trop répandue…

    Pourquoi encore produire des diags avec « absence d’amiante sur jugement de l’opérateur », ou pire, sur « décision de l’opérateur, » fausse conclusion qui accumule les erreurs ? Cela ne peut pas être une erreur de formation. C’est impossible. Ou alors, il y a aussi un problème dans la certification OFDI/OFDTI qui est d’une lourdeur absolue pour l’OF, je peux en témoigner.

    J’avoue que je ne comprends pas. Moi, je dois dire que cela me dépasse.

    Je continue surtout à penser que tant qu’il n’y aura pas quelques opérateurs réellement radiés, avec mise en cause de leur RCP, sur de vrais litiges, et avec publicité, on n’avancera pas.

    Et que l’on arrête de nous parler des « contrôles ». Car de véritables contrôles, il n’y en a pas. Et il n’y en a jamais eu.

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