RICHARD MORIN (FIDI) : « LA PÉRIODE ACTUELLE EN MATIÈRE D’ASSURANCE RCP RESTE TRÈS DÉLICATE » Profession

Publié le par Mathias LOVAGLIO

Richard Morin, dirigeant du réseau BC2E et président de la commission Assurances de la FIDI, revient sur le retrait de MMA et sur le nouveau partenariat conclu avec le cabinet Condorcet. L’occasion de faire le point sur la situation plus que préoccupante du marché de la RC Pro des diagnostiqueurs immobiliers.

Après le retrait de l’assureur MMA du contrat groupe de la FIDI, un nouveau partenariat a été conclu avec le cabinet Condorcet pour la couverture RC Pro de vos adhérents, pouvez-vous nous en présenter les grandes lignes ?

Depuis près de 15 ans, la FIDI disposait d’un contrat groupe qui couvrait l’ensemble des activités des diagnostiqueurs indépendants. Il s’agissait d’un contrat optionnel et individualisé, facturé directement par l’assureur aux adhérents.

Les contrats étaient jusqu’alors renouvelés pour des périodes de 2 ou 3 ans, quasiment sans augmentation ni changements majeurs, jusqu’à ce qu’en mai dernier MMA nous informe de son retrait du marché à l’issue de la période qui arrive à terme fin 2022. Ce contrat groupe, très avantageux pour les diagnostiqueurs et peu rentable pour eux du fait de primes assez basses, ne leur convenait plus.

Nous n’avons malheureusement pas trouvé d’assureur souhaitant reprendre un contrat de groupe, malgré la réflexion que nous avons menée et nos propositions pour adapter le cahier des charges à la situation et rendre le contrat plus attractif pour l’assureur.

Nous avons dû parer au plus pressé afin de trouver une solution assurantielle pour nos adhérents et même si la FIDI a conclu un partenariat avec le cabinet de courtage Condorcet, c’est désormais chaque adhérent qui contractualise individuellement.

Quelles sont les conséquences de ce changement de partenariat pour vos adhérents ?

Être nouvel entrant dans la profession donne droit à ce partenariat assurantiel sans difficulté par l’intermédiaire de la FIDI.

Cependant, pour nos adhérents plus anciens, la décision de couverture revient à l’assureur et celui-ci étudie chaque cas selon son profil, son historique et ses antécédents de litiges.

Notre partenariat actuel propose des « contrats d’équilibre » avec des primes qui permettent à l’assureur de continuer à être présent sur le marché du diagnostic immobilier.

Nous enregistrons en général une hausse moyenne des primes de l’ordre de 20 à 25%, ce qui n’est pas aussi important que ce à quoi nous nous attendions, et que nous avions même anticipée vu l’évolution du marché. Le prix d’appel pour des diagnostiqueurs qui démarrent avec un CA inférieur à 100 000 € et aucun sinistre reste même très convenable.

En revanche, la situation est plus compliquée pour les entreprises de taille moyenne, voire de grande taille, qui ont fait face à des sinistres, ce qui est le cas de nombreux cabinets qui existent depuis 5 ou 10 ans. Pour ce type d’entreprise, la prime d’assurance peut augmenter beaucoup plus, selon les profils.

L’autre gros problème auquel nous sommes confrontés aujourd’hui, c’est que nous avons quelques adhérents qui n’ont pas encore de cotation du fait de leur sinistralité. Il y a donc un risque que certains cabinets se retrouvent sans assurance au 1er janvier prochain. Cela reste des cas encore exceptionnels mais, si je me projette dans le temps, je crains que cette situation ne s’améliore pas.

Pour quelles raisons ?

La période actuelle est délicate, voire très délicate. Nous constatons une augmentation importante des appels en responsabilité, surtout avec le DPE et les mesures d’interdiction de location qui créent des mécontentements. La fiabilisation du DPE ne nous a pas aidés. Nous sommes dans une période où les gens ont des doutes sur la qualité de nos rapports et essaient de trouver des failles pour nous attaquer. Cela ne risque pas de s’améliorer. C’est pourquoi la filière doit défendre beaucoup plus fermement les sinistrés en les accompagnant mieux et en faisant évoluer les comportements.

Quels moyens la FIDI compte-t-elle déployer pour défendre ses adhérents confrontés à la sinistralité et réduire les appels en responsabilité ?

Il faut inciter nos adhérents à être plus réactifs lorsqu’une réclamation survient, en la traitant au plus tôt, au lieu de laisser les choses prendre des proportions démesurées. Nous allons proposer des formations afin de sensibiliser sur l’importance de la bonne prise en compte des réclamations. Quand et à quel moment faut-il se préoccuper d’un appel téléphonique ou d’un courrier qui risque d’engendrer quelque chose de beaucoup plus important ? Nous sommes convaincus que plus tôt le problème est traité, analysé, voire négocié, plus les conséquences en seront limitées. Nous devons absolument faire baisser les appels en réclamation et, bien sûr, les sinistres qui en découlent si nous laissons les choses s’envenimer.

Nous avons également mis en place un comité de surveillance de la sinistralité pour essayer de minimiser, voire d’annuler les appels en sinistralité. Sa mission est d’étudier les sinistres de nos adhérents et de les aider à se défendre. Il est composé de techniciens pour qualifier les sinistres, accompagnés de nos partenaires du cabinet d’avocats AVOX pour analyser chaque sinistre et conseiller nos adhérents sur la façon de le traiter.

Ce comité va aussi travailler à la reconquête d’un contrat groupe.

Vous pensez donc être en mesure de retrouver un contrat groupe pour les adhérents de la FIDI ?

Oui. Le contrat groupe que nous avions avec MMA aurait clairement dû être revalorisé plus tôt. À la fin, le pas à franchir était trop grand pour continuer et, en ce sens, nous pouvons comprendre le retrait de MMA.

Nous disposons maintenant d’un peu de temps pour étoffer notre cahier des charges et, dès janvier 2023, nous allons partir à la recherche d’un partenaire qui puisse couvrir les adhérents de la FIDI de la meilleure façon qu’il soit.

Les assureurs ont besoin de mieux comprendre le risque qui est couvert et dans quelles proportions. Nos activités se sont beaucoup diversifiées, le DDT n’est plus ce qu’il était il y a 15 ans, et une mise à jour est donc primordiale. Indéniablement, il faut reconnaitre qu’une prime d’assurance inférieure à 2 000 € parait légère lorsque l’on réfléchit aux risques possibles. Une augmentation semble inéluctable, mais cette augmentation doit être lissée dans le temps.

Il faut aussi travailler au réajustement de la couverture de certaines activités et de certaines entreprises. Si quelques contrats peuvent avoir des couvertures supérieures, la plupart proposent le minimum exigé par la réglementation [300 000 € par sinistre et 500 000 € par année]. Certaines entreprises peuvent donc se retrouver dans une situation inconfortable sur des marchés qui demandent à être suffisamment armé pour répondre à des appels d’offres ou à des missions.

Nous gardons l’espoir, avec un cahier des charges plus adapté à la réalité, de trouver un assureur qui accepte le principe d’un contrat groupe.

Cette problématique de l’assurance RC Pro concerne l’ensemble de la filière, des actions sont-elles prévues avec les autres fédérations ?

C’est effectivement un sujet qui sera travaillé en intersyndicale. Aujourd’hui, il ne reste réellement que deux assureurs notoires, Allianz et Axa. Mais cette situation est fragile. Notre profession s’est beaucoup diversifiée et continue de se diversifier et nous devons d’abord nous préoccuper de faire en sorte que nos assureurs actuels restent sur le marché. Avec l’arrivée de l’audit énergétique règlementaire, nous sommes attendus au tournant. La position de notre assureur est claire : ils paient pour voir. Et si cela se passe mal, ils se retireront. Si d’autres assureurs se désengagent, nous allons nous heurter à un véritable problème pour nous assurer et dans l’obligation de nous tourner vers des « assureurs exotiques » dont, par expérience, nous savons que la pérennité et la fiabilité ne sont pas au rendez-vous.

Il existe d’autres assureurs importants en France qui peuvent couvrir notre profession et il faut aussi se donner les moyens de les faire revenir sur le marché.

En dehors d’une meilleure adéquation entre les primes et les risques, comment attirer à nouveau les assureurs sur le marché de la RC Pro des diagnostiqueurs ?

L’ensemble de la filière doit s’emparer sérieusement de cette problématique. C’est déterminant : sans assurance, pas de travail ! Les diagnostiqueurs doivent prendre conscience qu’il y a des domaines sur lesquels il faut éviter d’aller sans expérience. Ils doivent également s’orienter vers des formations qui ne soient pas simplement un sésame pour travailler, mais leur apportent une véritable montée en compétence. Il faut peut-être aussi exiger des formations complémentaires sur certains domaines qui ne nécessitent pas de certification.

Il faut promouvoir le savoir-faire et la compétence pour réduire la sinistralité. Les diagnostiqueurs doivent se montrer responsables face à cette situation qui risque d’empirer si nous ne faisons rien et qui, malheureusement, laissera forcément des cabinets sur le carreau.

 

SONDAGE : L’assurance RC Pro et vous 

Alors que le marché de l’assurance RC Pro des diagnostiqueurs est de plus en plus tendu, Diagactu souhaite connaitre votre situation au 1er janvier 2023. Changez-vous d’assureur ? Le montant de votre prime va-t-il augmenter ? Votre assurance va-t-elle couvrir l’audit énergétique réglementaire ? Quel est votre avis sur ces enjeux assurantiels dans notre filière ? Merci d’avance de répondre au court questionnaire ci-dessous réservé aux chefs d’entreprise. Nous rappelons que vos réponses sont strictement anonymes.

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