LES DANGERS DE L'AMIANTE Technique

Publié le par Alain

« Mon père ne croyait pas aux risques de l’amiante »
Daniel Pajaud a été professeur à l’université parisienne de Jussieu pendant plus de trente ans. En 2003, un cancer l’emporte en quelques mois. Le coupable : l’amiante.
« Mon père nous racontait à mes frères et moi que chaque matin, il lui fallait commencer par essuyer la poussière sur son bureau. Cela a duré pendant des décennies. » Cette poussière d’amiante, c’est celle-là même qui a tué le père de Jean-Luc, Daniel Pajaud. Ce géologue et paléontologue de formation a exercé à la faculté de Jussieu pendant plus de trente ans, sans jamais se douter qu’il se tuait à petit feu. Simplement en respirant.

En 1967, Daniel Pajaud devient maître-conférencier dans la toute jeune faculté de Jussieu. « Le problème de l’amiante là-bas a été connu très tôt, assure son fils Jean-Luc. Quelques personnes se mobilisaient d’ailleurs déjà mais mon père, comme la plupart des gens qui y travaillent, pensait qu’ils exagéraient. Il se contentait de se plaindre de cette poussière qui envahissait tout. »

Établir des responsabilités

En 1998, il prend sa retraite, « sans se douter de rien ». Mais quatre ans plus tard, il n’arrive pas à se défaire d’une mauvaise bronchite. Le verdict du pneumologue est sans appel : c’est un mésothéliome, un cancer de la plèvre. Les onze mois qui suivent ne sont que d’« atroces souffrances, sous respirateur ». Il décède en novembre 2003. « Le plus étonnant, c’est que l’on n’a pas vraiment parlé de l’amiante pendant la maladie de mon père », poursuit Jean-Luc Pajaud. « Dès qu’on la lui a annoncé, il a bien sûr fait le rapprochement, mais on en a peu discuté. On s’est concentrés sur la maladie. » Comme lui, cinq personnes ayant travaillé dans la faculté de Jussieu seraient depuis décédées d’un cancer lié à l’amiante. Pourtant, « on connaît les risques depuis les années 50 », avance-t-il. Il faudra attendre le 1er janvier 1997 pour que les autorités françaises l’interdisent totalement.

C’est pourquoi ce proviseur de lycée manchois se bat aujourd’hui. « On connaissait les risques depuis longtemps et on a quand même continué à faire vivre et travailler des gens dans ces lieux. Pour moi c’est une forme d’assassinat, c’est pourquoi il faut établir des responsabilités. »

Outre une procédure auprès du Fonds d’Indemnisation des Victimes de l’Amiante (FIVA), Jean-Luc Pajaud attend beaucoup d’un procès qui pourrait mettre plusieurs années avant d’ouvrir : celui de l’État. « Mon père est une des premières victimes d’exposition passive à l’amiante, et je n’hésiterai pas à me porter partie civile pour le prouver. » Mais le chemin sera long… « Certaines preuves sont sous scellés, car elles doivent d’abord être désamiantées », se désespère-t-il. Aujourd’hui, 1/3 de la faculté de Jussieu ne l’est toujours pas.

Source Ouest-France.fr

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