UNE MAJORITÉ DE DIAGNOSTIQUEURS CONSCIENTS DE L’URGENCE D’AMÉLIORER LE DPE Profession

Amélioration du DPE
Publié le par Mathias LOVAGLIO

Alors que le ministère de la Transition écologique prépare un plan d’actions pour améliorer la qualité du DPE et quelques jours après la parution d’un nouvel article stigmatisant les diagnostiqueurs immobiliers, nous avons voulu connaitre votre avis sur les solutions à envisager. Vous êtes d’ailleurs 55,6% à trouver ces critiques justifiées et paraissez pleinement conscients que des améliorations sont possibles à différents niveaux.

En matière de formation/certification, quelles seraient les solutions les plus à même d’améliorer la pratique du DPE ?

  • Le renforcement de la formation initiale (44%)
  • La création d’une journée de sensibilisation des certifiés aux bonnes pratiques du DPE (36%)
  • Le renforcement des formations continues (34%)
  • L’homogénéisation des formations, des examens et des contrôles des OF et des OC (30%)
  • Le renforcement des prérequis (25%)
  • Le renforcement des contrôles sur site par le certificateur (16%)
  • Le renforcement des contrôles du Cofrac sur les certificateurs (13%)
  • Le renforcement des conditions d’accréditation des organismes de certification (11%)
  • Le durcissement des examens pour la certification (10%)
  • Le renforcement des conditions de certification des organismes de formation (10%)
  • Le renforcement de la surveillance documentaire (6%)

Oui au renforcement de la formation, mais avec de la pratique !

Prérequis, formation initiale, formation continue, durcissement des examens de certification ou encore création d’une journée de sensibilisation aux bonnes pratiques du DPE comme cela est envisagé par le ministère de la Transition écologique, près de 93% d’entre vous plaident pour un renforcement de la formation/certification au sein de la profession au travers d’une ou plusieurs de ces pistes. En matière de prérequis, vous êtes plusieurs à pointer du doigt le manque de connaissances du bâti de certains de vos confrères et même à dénoncer le Titre III délivré trop facilement à des candidats issus d’horizons parfois lointains avec le monde du bâtiment. « À ce jour, il est préféré la quantité de diagnostiqueurs sur le terrain au détriment de la qualité ».

Selon vous, le besoin de formations devrait se concentrer sur le terrain et la pratique, quitte à en augmenter la durée, notamment après chaque changement de réglementation : « On ne fait plus un DPE aujourd’hui comme on le faisait il y a 15 ans. Il faut une formation solide théorique mais aussi pratique ». Un constat partagé par un jeune certifié : « aujourd’hui je paie le manque de n’avoir pas eu une bonne formation. Après une période d’essai qui a été arrêtée après trois mois par le chef d’entreprise, je ne me sens toujours pas assez compétent ». Ce manque de pratique pourrait donc être compensé par des journées de formation sur le terrain, logiciels en main.

Pour cela, certains d’entre vous attendent que « les formateurs montent en compétences et puissent avoir tous les outils pour transmettre les bonnes notions aux apprenants. les durées de formations sont pour la plupart beaucoup trop courtes. L’ODI fraichement formé se retrouve sur le terrain livré à lui-même ».

Quelques-uns vont encore plus loin en estimant que le DPE est désormais affaire de spécialiste : « aucun des renforcements proposés ne saurait régler le problème du relevé nécessaire à la réalisation d’un DPE de qualité car réaliser six diagnostics et le DPE en plus devient une aberration quand on réclame de la cohérence et de la fiabilité. Le DPE et le futur audit énergétique devraient être réalisés par un spécialiste. Tant qu’on n’a pas compris ça, toute mesure pour régler ce problème restera illusoire. Le diagnostiqueur est victime d’une réglementation beaucoup trop exigeante pour une seule personne ».

La journée de sensibilisation envisagée par le ministère est loin de faire l’unanimité avec un peu plus d’un tiers d’entre vous à y être favorable. « Tout le monde ira à leur formation pour garder sa certification, mais dès le lendemain, sur le terrain, ceux qui bossent comme des sagouins ne changeront rien », estime l’un d’entre vous.

Quelles autres solutions permettraient d’améliorer la fiabilité et la pratique du DPE ?

  • L’augmentation des tarifs (54%)
  • L’harmonisation des pratiques dans l’ensemble de la profession (51%)
  • Des actions de sensibilisation des propriétaires et des professionnels de l’immobilier aux enjeux et impératifs du DPE (44%)
  • L’harmonisation des différents logiciels (39%)
  • La fiabilisation du moteur de calcul (37%)
  • La révision de la méthodologie du DPE (37%)
  • L’amélioration des logiciels (33%)
  • Le renforcement des contrôles de la DGCCRF (contrôle des certifications, contrôle des numéros Ademe, etc.) (12%)
  • Le renforcement des contrôles par l’Ademe (comparaison des DPE par numéro, adresse, etc.) (12%)

Le tarif, nerf de la guerre du DPE ?

La question des tarifs pratiqués pour la réalisation des DPE constitue l’un des facteurs clés pour améliorer la pratique des diagnostiqueurs selon la majorité d’entre vous.

Certains dénoncent les politiques tarifaires constatées dans leur environnement. Des DPE vendus à moins de 50€ peuvent-ils en effet être correctement réalisés et fiables ? « Il faut informer les propriétaires et leur rappeler par la même manière, qu’ils sont parfois complices de mauvaises pratiques en recherchant constamment le tarif le moins cher, parfois loin des prix standards du marché, alors qu’ils doivent se douter que cela cache souvent une méthodologie bâclée, pour effectuer plus de rendez-vous dans le temps le plus court. Les autres professionnels de l’immobilier sont également fautifs, dès lors qu’ils demandent des largesses au diagnostiqueur en échange d’un minimum convenu de dossiers ».

La question d’un prix plancher est dès lors plusieurs fois posée : « à profession réglementée, tarifs réglementés ». Une solution qui ne vous convainc pas tous, certains d’entre vous considérant que cela ne fera qu’augmenter la marge tarifaire des moins consciencieux.

Si quelques-uns considèrent que le DPE 2021 exige plus de temps, donc moins de rentabilité, pour que « le technicien personnalise les dossiers », la plupart d’entre vous aimeraient toutefois voir les tarifs revalorisés, une équation difficile entre un coût qui doit rester supportable pour le client et une prestation facturée en adéquation avec le temps passé sur le terrain, mais aussi au bureau.

Harmonisation ou simplification ?

Les écarts relevés par la presse consumériste quant aux résultats des DPE trouvent leur origine, selon une partie d’entre vous, dans le manque d’harmonisation du DPE, aussi bien dans la mise en pratique que dans les logiciels mis à disposition. La méthodologie demande à être précisée (espérons que la journée de sensibilisation prévue par le ministère vous aidera) pour être appliquée de façon plus homogène. « Quand on veut éradiquer les mauvaises pratiques, il y a d’une part le diagnostiqueur qui fait n’importe quoi et il y a d’autre part le texte qui permet de faire n’importe quoi. Ce n’est pas à nous diagnostiqueurs de changer quoi ce soit, mais au ministère de clarifier tout cela ». Des réponses sont attendues de la part des diagnostiqueurs que cela soit dans la définition de certaines notions (surface habitable, sous-sols aménagés, ponts thermiques, etc.) ou la façon de traiter certaines situations particulières, notamment pour mieux cadrer les investigations à réaliser : « les professionnels consciencieux sont demandeurs de référentiels, car eux, savent se remettre en question et évoluer ».

Les pouvoirs publics pourraient aussi s’investir plus largement, par exemple, en mettant en place « une adresse mail exclusive aux cabinets de diagnostic vers un ou des référents de la DHUP afin d’avoir des réponses précises puis les publier tous les mois afin que cela fasse partie des bonnes pratiques à utiliser ».

L’harmonisation des logiciels, voire le recours à un seul logiciel édité par le ministère pour l’ensemble de la profession, sont évoqués : « des actions de comparaison des DPE sur un même bien pour évaluer les pratiques et les logiciels » pourraient ainsi être menées.

Certains estiment que ce manque d’harmonisation est la conséquence d’une méthodologie jugée trop complexe, avec des effets pervers pour certains logements, notamment les petites surfaces. « Une simplification drastique des données à entrer » est espérée par quelques-uns, d’autant plus que certaines d’entre elles n’ont aucune influence sur les calculs. D’autres proposent de revoir (une nouvelle fois) la méthode en impliquant plus les « gens de terrain », quitte à « séparer l’isolation et les performances du bâtiment, d’une part, et le chauffage et l’ECS, d’autre part », voire à supprimer la consommation d’ECS du calcul pour ne la donner qu’à titre d’information. Et quelques-uns militent carrément pour un retour de la méthode sur factures… Enfin, le moteur de calcul pourrait aussi être amélioré au niveau des recommandations de travaux, pas toujours pertinentes.

Impliquer les clients et prescripteurs avec de nouveaux outils

L’accès aux bonnes informations est une problématique encore plus accrue avec le DPE 2021. Beaucoup d’entre vous sont confrontés à des donneurs d’ordre et surtout des syndics qui ne jouent pas le jeu : absence de transmission d’information, renseignements peu fiables, etc. Améliorer la collecte des données indispensables à la réalisation des DPE est donc une priorité. Et les idées ne manquent pas : création d’une fiche de renseignements à l’intention des clients qui pourrait être jointe aux ordres de mission, check-list pour le diagnostiqueur, affichage d’un QR code dans les parties communes permettant d’accéder aux données relatives à l’immeuble (chaufferie, surface de l’immeuble, caractéristiques des travaux d’isolation, etc.), création de bases de données nationales renseignant les dates de construction des bâtiments, les caractéristiques des différents modèles de chaudières, etc. « À quand une obligation règlementaire pour les donneurs d’ordre, syndics compris, de nous communiquer l’intégralité des documents et renseignements dont nous avons besoin ? Il est très difficile d’obtenir les factures en matière de rénovation énergétique, d’autant plus, lorsque le bien a connu plusieurs propriétaires, ou encore sur le système de chauffage collectif. » Concernant les travaux de rénovation énergétique, la mise en place progressive du Carnet d’information du logement à compter de janvier prochain pourrait faciliter le travail des diagnostiqueurs, mais il faudra du temps pour qu’il se généralise.

Par ailleurs, il serait souhaitable de mieux communiquer sur les objectifs réels du DPE qui reste une estimation et non « un outil fiable et parfait reflet de la performance énergétique d’un logement ».

Faire le tri dans la filière

Si les diagnostiqueurs ont conscience des multiples lacunes qui conduisent à des difficultés de mise en œuvre et d’homogénéisation des pratiques du DPE, nombreux sont ceux qui dénoncent un manque de sérieux et de conscience professionnelle d’une partie de la profession : « des diagnostiqueurs en région de Saint-Nazaire sont spécialisés dans le passage des notes F et G vers une note E. Que fait-on ? ». Car la pression est parfois réelle sur vos épaules : « Les banques ne prêtent plus aux acquéreurs qui veulent acheter un bien classé G, on nous demande de tricher, mais c’est impossible. Comment fait-on sans passer pour une chiante ? »

« Il faut faire le ménage dans la profession (surtout dans les grandes villes) afin que ceux qui aspirent à vivre de leur travail et qui souhaitent donner de la valeur à leur profession puissent être reconnus et continuer à s’investir dans ce beau métier ». Pour « virer ces margoulins », plusieurs solutions sont proposées : « une harmonisation et systématisation du traitement des plaintes sur les DPE afin de repérer et écarter les diagnostiqueurs qui ne travaillent pas correctement (problème de compétence ou de rigueur dans le travail) », « contrôles aléatoires a posteriori des diagnostics réalisés par un organisme indépendant », contrôle de l’enregistrement ou des doublons Ademe, renforcement des investigations de la DGCCRF, etc.

L’arrivée de l’audit énergétique inquiète…

Déjà repoussée de 15 mois, l’arrivée de l’audit énergétique réglementaire pour la vente des passoires thermiques en monopropriété continue d’inquiéter. Dans ce contexte d’un DPE pas encore totalement fiabilisé dans sa méthode et sa pratique, il est demandé au ministère de « terminer cette réforme bâclée avant de passer aux audits énergétiques ».

Comme toujours, nous finirons par une note d’optimisme avec ce diagnostiqueur œuvrant dans une région montagneuse : « dans mon secteur d’intervention, en montagne, personne ne m’a fait une observation sur le nouveau DPE. Au contraire mes clients le trouve beaucoup plus compréhensible. Pour moi, il est simple à l’emploi ! ».

Sondage réalisé du 10 au 14 octobre 2022 auprès d’un panel de 382 répondants.


WEBINAIRE | Présentation du plan d’actions pour les DPE

Les représentants des trois principales fédérations de diagnostiqueurs (CDI-FNAIM, FIDI et SIDIANE) participeront à un webinaire organisé par Diagactu, lundi 17 octobre à 9h30. Ils commenteront les évolutions à prévoir sur les pratiques des diagnostiqueurs consécutives aux mesures d’un plan d’actions pour améliorer les DPE qui sera mis en œuvre d’ici la fin de l’année. S’inscrire au webinaire.

 

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