DANS L’IMPOSSIBILITÉ DE STATUER SI L’AMIANTE ÉTAIT DÉTECTABLE SANS « TESTS INVASIFS », LA COUR D’APPEL RELAXE LE DIAGNOSTIQUEUR Veille juridique

Cour d'appel - Jurisprudence
Publié le par Mathias LOVAGLIO

Condamnée en première instance, cette société de diagnostic immobilier a finalement échappé à toute sanction après que la cour d’appel ait considéré qu’il était impossible de démontrer que la présence d’amiante était détectable sans « tests invasifs ».

La société de diagnostic immobilier condamnée en première instance…

Après avoir acquis un immeuble le 25 octobre 2018, les acquéreurs ont découvert, à l’occasion de travaux de réhabilitation, la présence d’amiante dans un fourreau dans lequel passent les conduites de chauffage. Contraints de faire procéder à un repérage avant travaux et au désamiantage de leur bien, ils décident alors d’assigner la société en charge du diagnostic amiante avant vente afin de la faire condamner au règlement des frais engagés. Cette dernière est condamnée le 6 octobre 2021 par le tribunal judiciaire de Nancy au paiement de 12 734,19 € à titre de dommages et intérêts et à 1 500 € pour le paiement des frais de justice.

Pour statuer ainsi, le tribunal a relevé que le rapport diagnostic amiante, établi le 22 juin 2018 préalablement à la vente du bien immobilier et concluant à l’absence d’amiante, était erroné et qu’il apparaissait, dès lors, que la société de diagnostic immobilier avait commis une faute qui engage sa responsabilité délictuelle envers les acquéreurs.

La société de diagnostic immobilier décide cependant de faire appel.

… mais relaxée en appel

Dans son arrêt du 14 novembre 2022, la cour d’appel de Nancy infirme totalement le jugement rendu en première instance. Pour expliquer ce revirement, l’arrêt précise : « Il est établi par les pièces au dossier que l’immeuble présentait des matériaux amiantés au niveau d’un fourreau par lequel circulaient des conduites de chauffage, celui-ci étant enfoui sous le sol de l’habitation mais dont [les acquéreurs] précisaient qu’il était accessible par un regard situé dans l’entrée. L’assureur [du cabinet de diagnostic] estimait pour sa part qu’il était nécessaire d’ouvrir une trappe en béton et proposait la réalisation d’une expertise amiable, qui a été refusée par [les acquéreurs].

Il ressort des photographies versées aux débats que la trappe ouvrant un regard sur les canalisations pouvait être manipulée sans atteinte au bâtiment et que son ouverture ne peut donc être qualifiée d’opération destructrice (la trappe étant déposée sur les photographies sans aucune trace visible de dégradation sur elle-même comme sur le sol sur lequel elle reposait). En revanche, [les acquéreurs], comme le soulève à juste titre [la société de diagnostic], n’ont pas versé de pièce – notamment le rapport établi avant travaux, le devis des travaux de désamiantage ne comportant pour sa part aucune précision suffisante – permettant de déterminer précisément dans quels matériaux se trouvait l’amiante et où ceux-ci étaient localisés, ce qui était la seule manière de caractériser si l’ouverture de la trappe permettait à elle seule de les repérer ou non. En effet, aucune faute ne peut être reprochée au diagnostiqueur si le repérage des matériaux amiantés nécessitait de procéder à des tests invasifs, que ce soit si l’amiante se trouvait à l’intérieur des tuyaux visibles à l’ouverture de la trappe ou dans des matériaux situés à l’intérieur du fourreau et non visibles depuis le regard ».

Dès lors, les acquéreurs ne démontrant pas que les matériaux amiantés pouvaient être repérés sans travaux destructifs n’établissent pas une faute à la charge du diagnostiqueur. En revanche, la société de diagnostic se voit débouter de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive. Les acquéreurs se voient condamnés aux dépens de première instance, chaque partie conservant la charge de ses dépens d’appel.

Cour d’appel de Nancy, 14 novembre 2022, RG n°21/02686

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Un commentaire

  • Pascal CLERC a écrit

    On arrête les conneries un peu … les conduites enterrées ne font pas partie du programme des repérages amiante Listes A et B … ça s’arrête là !

    Et dire qu’on a dépensé l’argent du contribuable pour ces deux procès … ;(

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