AUDIT ÉNERGÉTIQUE : LE PLUS DUR EST-IL À VENIR ? Profession

Publié le par Mathias LOVAGLIO

À la suite de l’officialisation du nouveau report de l’audit énergétique réglementaire au 1er avril 2023, Stéphane Prouzeau, vice-président de la FIDI, Thierry Marchand, président de la CDI-FNAIM jusqu’au 31 août, et Jean-Christophe Protais, président de SIDIANE, se montrent plutôt satisfaits de cette décision. Mais ils s’accordent également sur le fait que le travail reste encore important afin de renforcer l’utilité de cet outil et d’en finaliser la méthode.

Un report nécessaire accueilli favorablement

Pour justifier la décision du report, Olivier Klein, ministre délégué en charge de la Ville et du Logement, a évoqué un « manque d’entreprises et de personnels qualifiés ». Un argument que conteste Stéphane Prouzeau, vice-président de la FIDI : « j’ai lu dernièrement plusieurs articles qui disaient que les diagnostiqueurs n’étaient pas prêts. Il ne faut pas inverser les responsabilités. Aujourd’hui, s’il y a report, ce n’est pas du fait des diagnostiqueurs, mais bien parce que les documents qui devaient être fournis par les pouvoirs publics ne sont pas prêts. La trame du rapport n’est toujours pas sortie, une version « finale » nous ayant été présentée en réunion seulement la semaine dernière. Et nous n’avons pas pu avoir les deux mois de tests qui étaient prévus par le calendrier de mise en place de la DHUP. Ce report est donc une saine décision ». Jean-Christophe Protais, président de SIDIANE, partage la même vision : « les éléments fondamentaux (trames des rapports, logiciels de calcul, harmonisation des pratiques, personnels formés…) ne sont pas finalisés en dépit des efforts réalisés par tous les acteurs de la filière à commencer par les entreprises de diagnostic et les diagnostiqueurs eux-mêmes. Le report au 1er avril plutôt qu’au 1er janvier nous laisse un peu plus de temps pour finaliser proprement cet audit. C’est une bonne nouvelle et une sage décision au vu de la situation dans laquelle l’on se trouve aujourd’hui, d’autant que le volume de passoires énergétiques est bien plus important que prévu (12 000 audits énergétiques à réaliser en plus chaque mois). La loi Climat et résilience est bien faite et, même s’il est urgent de ne pas attendre, il faut tout de même se donner du temps pour sortir un audit et une méthode stabilisés et pour former des diagnostiqueurs, plutôt que de reproduire les erreurs commises au moment du nouveau DPE l’an dernier ». Thierry Marchand, dont le mandat de président de la CDI-FNAIM s’achève à la fin du mois d’août (Yannick Ainouche a été élu pour lui succéder à compter du 1er septembre), voit dans ce report plus lointain qu’on ne pouvait l’imaginer, une volonté de donner plus de poids à l’audit énergétique dans la politique de rénovation des passoires thermiques : « l’audit au 1er septembre 2022 aurait fait plaisir à l’acquéreur, mais n’aurait pas servi à grand-chose car il n’aurait pas permis d’obtenir les aides de MaPrimeRénov’. Pour les obtenir, il faut adapter la loi de Finances afin de rendre les audits énergétiques obligatoires compatibles. Cette loi se discute en novembre pour une application en janvier. En optant pour le 1er avril 2023, le gouvernement s’est peut-être donné une marge de manœuvre supplémentaire pour permettre de rendre l’audit énergétique obligatoire compatible avec les aides, en anticipant d’éventuelles difficultés sur ce point ».

Encore du pain sur la planche

Le travail à accomplir pour finaliser l’audit reste encore important et ce report de 7 mois ne sera pas de trop selon les Fédérations pour le parfaire. Stéphane Prouzeau espère pouvoir tester l’audit au 4e trimestre 2022. « Les diagnostiqueurs devraient avoir la trame du rapport et les logiciels au mois de septembre. Il va falloir désormais que l’on teste et que l’on aille au bout des formations. Un certain nombre de diagnostiqueurs sont déjà formés et il faut que l’on voie si la formation qui a été réalisée est suffisante pour réaliser ces audits. Il ne faut pas non plus oublier de se mettre au travail pour définir le régime définitif de qualification des auditeurs pour 2024. L’intégrer à la certification serait probablement une bonne chose. »

« Désormais, l’échéance réaliste du 1er avril 2023 oblige toutes les parties prenantes à se mettre en ordre de marche de manière plus intégrée, transversale et mieux coordonnée », estime Jean-Christophe Protais. « Cela implique un travail commun entre la DHUP, les diagnostiqueurs immobiliers, les bureaux d’étude, les organismes de formation, les organismes de certification, les éditeurs de logiciels et les professionnels de l’immobilier. Avec une feuille de route claire, un échéancier précis et un comité de suivi permanent. Objectif : aboutir à un audit énergétique opérationnel, crédible, incontesté. Cet audit énergétique doit constituer une vraie valeur ajoutée par rapport à l’information produite dans le cadre du DPE (pour ne pas en faire un DPE bis). Il doit aussi devenir un référentiel pertinent pour les propriétaires qui devront réaliser des travaux de rénovation énergétique utiles, durables, optimisés et avec des coûts soutenables pour les finances publiques comme pour les propriétaires. Sans quoi, au lieu d’inciter à des travaux indispensables, il encouragera l’inaction et l’absence d’investissement ».

Des questions en suspens

Outre l’outil en lui-même, deux sujets essentiels pour les diagnostiqueurs restent donc en suspens. Deux sujets étroitement liés entre eux : la mise en cohérence des différents audits afin que tous puissent donner droit à l’obtention des aides et la qualification des professionnels en charge de réaliser l’audit pour la mise en vente des passoires énergétiques en monopropriété à l’issue de la période transitoire qui s’achèvera fin 2023. « L’audit énergétique réglementaire n’a de sens que si c’est un outil global. Ce serait logique, qu’à terme, on n’ait plus qu’un seul audit énergétique » estime ainsi Thierry Marchand. Mais comment unifier des audits basés sur des méthodes de calcul différentes (3CL ou Th C-E ex) ? Quelles seront alors les conditions de formation et de qualification des auditeurs : la création d’une nouvelle mention « audit » pour les titulaires de la certification DPE, une qualification RGE ou une refonte totale des conditions de qualification ? Au final, les diagnostiqueurs conserveront-ils un accès au marché de l’audit énergétique ou bien devront-ils céder leur place au profit d’autres professionnels, notamment les thermiciens ? Les prochains mois seront déterminants pour l’avenir d’une prestation porteuse d’opportunités pour de nombreuses années et le rôle des organisations professionnelles qui défendent les intérêts des diagnostiqueurs immobiliers sera plus que jamais crucial.

Communiqué de presse de Sidiane sur le report (4 août 2022)de l’audit énergétique

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