DOSSIER : ÉTAT DES LIEUX D’UNE REPRÉSENTATION MORCELÉE Profession

Malgré sa relative jeunesse, notre filière a déjà connu beaucoup d’initiatives pour la représenter. UNDI, FNECI, UNEDTBI, UNECTPI, CFDI, pacte déontologique, et désormais Alliance du diagnostic immobilier, SIDIANE, ONEDI, Fed Experts… il n’est pas toujours aisé de s’y retrouver au sein d’un paysage représentatif qui évolue en permanence, traduisant les difficultés de la profession, pourtant limitée à une dizaine de milliers de membres, à s’organiser. Car si chacune de ces organisations appelle au rassemblement, l’unité parait encore illusoire tant les intérêts et les objectifs divergent parfois. Afin de vous aider à vous y retrouver, on vous propose donc un état des lieux des principales organisations représentatives et initiatives pour structurer la profession.
L’Alliance du diagnostic immobilier
L’Alliance du diagnostic immobilier est un nouveau syndicat issu de la fusion de deux organisations historiques de la profession qui ont régulièrement participé aux consultations ministérielles : la Fédération interprofessionnelle du diagnostic immobilier (FIDI) fondée en 2004 et la Chambre des diagnostiqueurs immobiliers (CDI, ex-CDI FNAIM) créée en 2007. Co-présidée par Lionel Janot (président du groupe L3a) et Yannick Ainouche (PDG du groupe EX’IM), l’Alliance du diagnostic immobilier entend représenter les diagnostiqueurs immobiliers dans leur diversité, depuis les solos indépendants jusqu’aux PME en passant par les franchisés. Elle intervient régulièrement dans les travaux de normalisation.
La structure syndicale adoptée par l’Alliance lui donne des moyens d’actions sur le code du travail et les négociations de branche. Parmi ses objectifs, l’Alliance du diagnostic immobilier souhaite contribuer à une meilleure reconnaissance du métier comme la possibilité, pour les indépendants, d’accéder aux fonds de formation professionnelle. Elle entend également travailler à des évolutions du dispositif de certification DPE afin d’en réduire l’impact financier tout en préservant l’objectif de consolidation des compétences des diagnostiqueurs.
Si l’Alliance du diagnostic immobilier dispose de l’expérience des négociations avec les pouvoirs publics des ex CDI et FIDI, elle doit aussi en assumer l’héritage parfois contesté. Elle bénéfice de sérieuses compétences internes qui mériteraient d’être valorisées par une communication plus active auprès de l’ensemble de la profession mais aussi du grand public.
L’Alliance du diagnostic immobilier en bref
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L’Association nationale du diagnostic immobilier (ANDI)
Fondée en juillet 2023 par plusieurs personnalités de la profession (Romy Payot, Nassere Allag, Pascal Clerc et Pierre-Yves Sachot), l’ANDI a pour objet de renforcer l’accompagnement des diagnostiqueurs immobiliers dans leur quotidien professionnel et d’améliorer leur image auprès du grand public, des professionnels de l’immobilier et des instances nationales. Pré-médiation, veille technique et juridique, pilotage d’activité, l’association poursuit le développement de ses services afin de répondre aux besoins des diagnostiqueurs immobiliers, notamment les solos qui ont le sentiment d’être livrés à eux-mêmes et peu soutenus par les organisations professionnelles. Si elle n’a pas vocation à représenter la profession, elle entend dialoguer avec les institutions afin de contribuer aux avancées techniques et aux évolutions du cadre réglementaire. L’association se structure progressivement afin de construire des outils et une logistique pérennes.
L’ANDI relève plus d’une association d’entraide entre diagnostiqueurs et de promotion du métier que d’une structure visant à représenter la profession auprès des pouvoirs publics, même si elle ne s’interdit pas de participer aux débats et consultations sur son avenir.
L’ANDI en bref
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FED Experts
FED Experts a été fondée en octobre 2021 par Hassad Mouheb (Wedge Institute) et entend rassembler les acteurs du diagnostic immobilier, du contrôle technique du bâti et de l’efficacité énergétique, aussi bien indépendants que salariés. Sa base d’adhérents s’étend donc au-delà des diagnostiqueurs immobiliers puisqu’elle compte également des professionnels ou des sociétés gravitant autour de l’efficacité énergétique (thermiciens, installateurs de panneaux photovoltaïques, etc.). Très actif dans les médias et sur les réseaux sociaux, Hassad Mouheb dénonce régulièrement les pratiques frauduleuses au sein de la profession (DPE de complaisance, exercice du métier sans certification, etc.). FED Experts a aussi noué des contacts au sein de la sphère politique et n’hésite pas à le mettre en avant dans sa communication. Récemment, FED Experts a travaillé à la rédaction d’un amendement à la proposition de loi contre la fraude aux aides publiques déposé par le député Daniel Labaronne et qui vise à renforcer le dispositif d’identification des diagnostiqueurs immobiliers.
FED Experts entretient des relations houleuses avec une partie des acteurs de la filière en raison de prises de parole polémiques et une certaine propension à mettre l’accent sur la fraude des diagnostiqueurs dans les médias.
FED Experts en bref
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Les Diagnostiqueurs indépendants (LDI)
L’association Les Diagnostiqueurs indépendants (LDI) a vu le jour début 2016 afin de porter des revendications dans le cadre du projet de réforme du dispositif de certification des diagnostiqueurs initié en 2015 par les pouvoirs publics. Opposée au principe de recertification obligatoire, LDI a plusieurs fois obtenu du Conseil d’État l’annulation des arrêtés compétences des diagnostiqueurs. Faute d’engagement de ses adhérents, l’association présidée par Frédéric Mirabel-Chambaud est en sommeil depuis deux ans. Si elle n’est plus en mesure d’assurer son rôle de soutien aux diagnostiqueurs, elle continue néanmoins de participer aux consultations des pouvoirs publics sur l’avenir de la filière.
À défaut d’avoir obtenu gain de cause sur la recertification, LDI a remporté quelques succès contre le régime de certification qui n’ont cependant pas abouti à sa révision. Sa mise en sommeil témoigne des difficultés rencontrées par les organisations pour trouver des professionnels en activité investis dans leur fonctionnement, posant ainsi la question de leur pérennité.
LDI en bref
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L’Organisation nationale d’éthique du diagnostic immobilier (ONEDI)
Dernière-née des organisations professionnelles, l’ONEDI a vu le jour en janvier 2025. Sa création a été motivée par un constat d’échec des instances représentatives existantes qui n’ont pas permis de traiter les maux qui affectent la profession : DPE Bashing, défaillances de la formation/certification, etc. Présidée par Patrick Gombaud, diagnostiqueur toulousain, l’ONEDI veut maintenant trouver sa place au sein du paysage représentatif de la profession et peser sur les décisions la concernant. L’adhésion est réservée aux personnes certifiées, indépendantes ou salariées. L’ONEDI souhaite aussi valoriser les missions des diagnostiqueurs immobiliers auprès du grand public avec notamment la création d’un portail d’information. Pour répondre à ses objectifs, elle entend s’appuyer sur un comité d’éthique, une charte qualité, un code de déontologie et un guide des bonnes pratiques.
L’organisation de la naissante ONEDI s’inspire de celle d’un ordre professionnel, option déjà retoquée par le passé par les pouvoirs publics. Les premières communications et le franc-parler suscitent déjà l’intérêt d’une partie des diagnostiqueurs immobiliers mais pourraient également se révéler limitant à l’heure de rassembler plus largement. L’ONEDI sera in fine jugée sur ses futures actions et ses résultats.
L’ONEDI en bref
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Syndicat interprofessionnel du diagnostic immobilier, de l’analyse et de la numérisation de l’existant (SIDIANE)
Fondé début 2022, SIDIANE est un regroupement de plusieurs majors et réseaux de franchise du secteur (AC Environnement, Diagamter/Aléa contrôles, Hyperion, etc.) rejoint, il y a un an, par d’autres acteurs (Agenda, Activ’Expertise, BC2E, etc.). Présidé par Jean-Christophe Protais, SIDIANE revendique représenter 3 100 collaborateurs au travers de ses entreprises adhérentes. S’il affirme défendre les petites structures via les cabinets franchisés de ses membres, SIDIANE apparait toutefois comme la « voix des gros » au sein de la profession. Participant régulièrement aux consultations avec les pouvoirs publics et impliqué dans le travail normatif, comme la future norme DPE, il a alimenté les débats avec plusieurs propositions comme la mise en place d’un contrôle périodique du bâti ou la controversée création d’une certification d’entreprise.
De par son image de regroupement de majors, SIDIANE peine à élargir son audience, même si certaines de ses propositions peuvent convaincre au-delà de ses seuls adhérents. Il a su néanmoins rapidement s’imposer dans le paysage représentatif de la filière grâce au poids des entreprises qui le constituent et un travail de lobbying efficace. Sa légitimité, et celle de son président qui n’a jamais exercé le métier, est cependant contestée par une partie des diagnostiqueurs immobiliers.
SIDIANE en bref
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Mais aussi…
À la demande de l’ex-ministre du Logement, Guillaume Kasbarian, Sidiane et l’Alliance du diagnostic immobilier ont constitué au printemps 2024 un Groupement des professionnels fédérés du diagnostic immobilier (GPFDI) afin de pouvoir siéger au Conseil supérieur de la construction et de l’efficacité énergétique (CSCEE), mais aussi au Conseil national de l’habitat (CNH) et d’autres comités. C’est à Jean-Christophe Protais que revient de porter la voix de cette structure intersyndicale au sein du CSCEE, Lionel Janot assurant le rôle de suppléant.
En novembre dernier, la Chambre des diagnostiqueurs (CDI) quittait le giron de la puissante Fédération nationale de l’immobilier (FNAIM) à laquelle elle était affiliée depuis sa création en 2007. Cette prise d’indépendance était une condition sine qua non de la fusion avec la FIDI au sein de l’Alliance du diagnostic immobilier. Mais la FNAIM ne souhaiterait pas en rester là et s’apprêterait à constituer une nouvelle chambre des diagnostiqueurs sous sa tutelle…
Courant janvier 2025, on apprenait le lancement d’un appel en vue d’organiser des États généraux du DPE et du diagnostic immobilier et de créer un Conseil national du diagnostic immobilier (CNDI), véritable instance de concertation regroupant des acteurs de la filière au sens large (organisations professionnelles, diagnostiqueurs indépendants, organismes de formation et de certification, Cofrac, etc.), mais aussi d’autres acteurs de l’immobilier, de la rénovation énergétique et des associations de consommateurs. Olivier Ducelier, diagnostiqueur salarié à Paris à l’origine de cette initiative, a annoncé une rencontre organisée le 19 février 2025 au ministère du Logemen autour de laquelle règne un certain flou : le cabinet de la ministre a démenti la tenue d’une réunion mais un rendez-vous serait bien programmé…
Les faiblesses d’une représentation diversifiée
Lors de nos sondages, nous avons pu constater qu’une majorité de diagnostiqueurs ne sont adhérents d’aucune organisation professionnelle. Inversement, il n’est pas rare qu’un même diagnostiqueur adhère à plusieurs d’entre elles. Si l’engagement syndical n’est pas dans la culture française (environ 10% des salariés adhèrent à un syndicat), encore plus dans les TPE qui composent majoritairement la filière du diagnostic immobilier, la reconfiguration actuelle du paysage représentatif avec l’apparition de nouvelles entités et une offre qui se diversifie changera peut-être la donne. Néanmoins, le manque de transparence quant au nombre réel d’adhérents, la confusion étant parfois entretenue entre entreprises adhérentes et diagnostiqueurs certifiés adhérents, ne permet pas une lecture aisée de la représentativité respective des organisations. Ce qui pose le problème de la légitimité que chacune revendique.
D’après un sondage réalisé auprès de nos lecteurs en juin 2024, 67% des diagnostiqueurs immobiliers s’estimaient mal représentés. Ce déficit d’adhésion, ajouté à une représentativité morcelée, n’est évidemment pas un atout pour peser auprès des pouvoirs publics qui n’hésitent pas à user de cet éparpillement pour imposer leurs positions sur certains sujets. Dès lors, les organisations professionnelles se retrouvent le plus souvent contraintes à réagir plutôt qu’à agir et être force de propositions dans une démarche plus positive et constructive. Parler d’une seule voix aurait indéniablement plus de poids, mais les intérêts et les combats parfois divergents des organisations professionnelles ne conduisent que trop rarement à une position unie pour faire front et obtenir gain de cause.
*Les informations sur le nombre d’adhérents indiquées dans l’article nous ont été communiquées par les organisations professionnelles, sans moyen d’en vérifier l’exactitude.
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